La Vieille Dame est de retour
- Le 24/07/2013
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A l'été 2006, alors qu'il semblait tout puissant, à la tête d'un championnat qui faisait trembler l'Europe, fort d'un effectif impressionnant dirigé par l'entraineur référence du moment et prétendait installer son hégémonie sur le Calcio tout en nourrissant des ambitions européennes démesurées, le club le plus populaire d'Italie est tombé.
Le déclin d'un géant
Un coup de tonnerre envoyé par la Gazzetta dello Sport le frappa de plein fouet. Le mythique journal diffusa une discussion suspecte entre Moggi, le directeur sportif des bianconeris, et le responsable de la désignation des arbitres pour les matchs de championnat qui se rapprochait d'une corruption. Le Calciopoli était lancé et allait bouleverser le paysage footballistique italien ; la vieille Dame, pourtant intouchable sportivement, tombait en disgrâce à coup de scandale.
Luciano Moggi, l'homme au coeur du Calciopoli
Sept ans plus tard la grande Juventus est de retour. Sept ans de procès et d'instabilité sportive où les joueurs, les entraineurs et mêmes les dirigeants se sont succédés pour des résultats en dent de scie. Sept ans pour revenir des enfers de la Serie B et tenter de se maintenir en haut du classement tout en regardant honteusement un rival qu'elle a longtemps pris de haut enchainer les trophées et redorer son blason.
Etrangement épargné par les sanctions malgré son implication désormais certaine dans le Calciopoli, l'Inter Milan s'était imposé comme le successeur des bianconeris. D'abord en récupérant leur titre de 2006 puis en profitant de sa chute pour récupérer certain de ses joueurs et en recrutant quelques années plus tard Jose Mourinho le dernier entraineur en vogue. Ainsi en l'absence de concurrence sérieuse mis à part une Roma qui bien que joueuse et très talentueuse persistait, en grande romantique du football italien, à finir dramatiquement à la seconde place, les nerazzurris avait bel et bien la main mise sur le football transalpin.
Mais aujourd'hui le vent à tourné et si l'Inter, trop lourd de ses succès récents, se noie dans le milieu du classement, la vieille Dame, elle, retrouve son allure d'antan. Enfin armée de joueurs sûrs et réguliers, loin des éphémères Diego, Amauri ou Krasic, et d'un projet de jeu cohérent et efficace, la Juventus a retrouvé son statut de 2006, fait office d'immense favori dans un championnat qu'elle vient de remporter pour la seconde fois consécutive et vise à nouveau l'Europe.
Le temps du renouveau
Un nouveau stade pour une nouvelle ère
Le véritable tournant de cette nouvelle Juventus date de l'intersaison 2011. Alors qu'Agneli venait de connaître une première saison de présidence très délicate, avec une décevante 7ème place en Serie A, une élimination précoce en Ligue Europa et le limogeage de l'entraineur qu'il avait recruté quelques mois plus tôt, il se rattrapa par deux excellentes décisions qui allait changer le sort du club. La première fut de faire venir Andrea Pirlo en qui Milan ne croyait plus pour tenter de le relancer et la seconde, plus risquée, fut de faire confiance à Antonio Conte, ancienne gloire turinoise, pour diriger son équipe et ce malgré ses mauvais résultats à l'Atalanta, sa seule expérience en division supérieur, qui mettaient un doute sur ses capacités au plus haut niveau.
Les deux paris se révèle être des succès, ou plutôt des triomphes. Le maestro de la squadra azzurra renait de ses cendres et retrouve son tout son éclat quand son nouvel entraineur va construire brillamment son équipe sur sa précision de passe et de sa science du jeu. Il va reconduire Pirlo dans son rôle de meneur reculé habituel et va savoir organiser son jeu autour afin profiter au maximum de ses qualités. En deux années il va également faire preuve de patience et de remise en question pour faire évoluer son système et le renforcer petit à petit pour en faire l'équipe ultra compétitive qu'elle est aujourd'hui.
Antonio Conte et Andrea Pirlo font éclater leur joie
Conte commença prudemment par mettre en place un 442 avec une organisation très classique basé sur un duo axial qui se réparti distinctement les rôles : un milieu qui couvre défensivement et qui se concentre sur la relance pour orienté à la base des actions, Pirlo, et un box-to-box plus puissant, qui va au pressing et est capable de remonter rapidement avec le ballon pour apporter du dynamisme et du tranchant au milieu, Marchisio. En l'absence de milieu offensif ce système reposait alors beaucoup sur les ailiers et les attaquants qui ne furent pourtant pas totalement à la hauteur de la tâche.
C'est l'intégration d'un autre recrue qui régla rapidement ce problème. Absent en début de saison, l'arrivé d'Arturo Vidal offrait une solution tactique à l'entraineur de la Juve. Joueur très complet, le chilien qui fut même longtemps utilisé comme défenseur par Marcelo Bielsa en sélection nationale pouvait sans problème reprendre le rôle de box-to-box de Marchisio et permettre à ce dernier, plus fin techniquement, d'évoluer un peu plus haut. En passant à un milieu à trois Conte résolvait non seulement le problème dut à l'absence de milieu offensif mais il libérait également Pirlo qui pouvait jouer un cran plus bas avec deux joueurs pour défendre devant lui. Ce milieu plus compact permettait également de faciliter les montés de Lichtsteiner, l'arrière droit, qui eu moins à craindre le contre adverse et pouvait s'exprimer plus librement. Ainsi avec ce nouveau 433 l'espace était mieux occupé et la plupart des joueurs s'en trouvère mieux exploités.
Mais ce système n'était pas exempt de tout défauts. Le manque d'ailier de haut niveau en était encore un et pour le compenser Conte titularisait régulièrement Vucinic sur le coté gauche qui piquait naturellement dans l'axe soutenir Matri. Cependant avec Chiellini en arrière le jeu de la Juventus y était plus fermé qu'à droite, le coté de Pepe et de Lichtsteiner et son activité débordante. De plus Pirlo et sa lenteur d'exécution souffrait de plus en plus des pressings adverses au fil des matchs.
Le jeune entraineur réagit et le dispositif changea une nouvelle fois quelques mois plus tard. Les problématiques ailiers disparurent du schéma de jeu qui vit la mise en place d'une défense à trois de fer constituée de Bonucci, Barzagli et Chiellini. Lichtsteiner pouvait maintenant évoluer un cran plus haut sur la même ligne que Estigarribia son pendant coté gauche. Ainsi en plus d'avoir des solutions sur les cotés plus faciles à atteindre, Pirlo pouvait compter sur Bonucci et Chiellini et leur qualité de passe pour l'aider dans la relance. Devant la Juventus repartait sur un duo d'attaque. La largeur était maintenant mieux utilisé et la relance était mieux assurée mais la Juventus y perdit en création offensive.
Si Antonio Conte a encore plusieurs fois utilisé le 433 pour remporter le scudetto 2012, le 352 fut définitivement adopté pour la saison 2012/2013. L'équipe subit peu de changement ; de retour au club Giovinco s'ajoute à la rotation des attaquants, seul poste avec celui d'arrière gauche qui ne semble pas avoir de titulaire fixe.
Un joueurs perturbera tout de même la hiérarchie avec une première année remarquée au club. Il s'agit du jeune Pogba qui, trop peu utilisé à son goût, à décider de quitter prématurément Manchester United pour rejoindre les biancorenis. S'il reste longtemps le premier remplaçant du trio Pirlo-Vidal-Marchisio le jeune français est tellement performant que son coach change de nouveau sa formation en toute fin de saison pour l'y inclure. Ainsi Pogba prend la place de Marchisio au milieu de terrain pendant que celui-ci est replacé en soutient de l'attaquant afin de tenté de résoudre ce problème de créativité dans un nouveau 3511.
Les résultats sont encore meilleur que l'année passée et la Juventus montre également un beau visage en ligue des champions en atteignant les quart de final où elle s'incline face au Bayern Munich futur vainqueur de la compétition.
Le 352 de la Juventus
Bien décidée à poursuivre sa marche en avant la Juventus s'est résolue à s'occuper de son grand point faible depuis plusieurs années : l'attaque. D'abord pas assez buteur puis pas assez créateur, en deux ans Vieille Dame a pu trouver des solutions à tous ses problèmes sauf à celui là. Déterminé à ne plus souffrir de ces maux le club a frappé fort et deux grands noms ont été recrutés ; Llorente le buteur basque qui arrive probablement pour ses qualités dans la déviations et la finition et faire parler son jeu en pivot et Tevez le taureau argentin venant surement avec sa fougue, son volume de jeu et sa créativité pour apporter plus de folie et de poids dans les derniers mètres.
Si ces choix se montrent aussi pertinent qu'ils sont alléchant et que l'équipe parvient à se montrer plus dangereuse et efficace tout en gardant sa solidité défensive et sa maîtrise du milieu de terrain, nulle doute qu'elle fera partie des principales prétendantes à la victoire finale en ligue des champions.
Carlos tevez sous ses nouvelles couleurs
Officiellement blanchie de toutes accusations concernant la Calciopoli, et ce contrairement à son directeur sportif de l'époque, une nouvelle Juventus est née. Nouveau stade, nouveaux dirigeants, nouvel entraineur, nouveaux systèmes et nouveaux cadres hormis l'éternel Gianluigi Buffon bien entendu, le club a su changer dans les grandes lignes pour s'insuffler un renouveau. La Vieille Dame a retrouvé sa couronne et ne compte pas s'arrêter là.
Et qui pourrait bien la faire descendre de son piédestal ? Les historiques rivaux, l'Inter, le Milan et la Roma ne semble pas en mesure de riposter tandis que le Napoli n'a pas su retenir son attaquant vedette trop envouté par le prestige de la Ligue 1. Seule la Fiorentina, auteur d'une saison encourageante et d'un recrutement ambitieux, paraît pouvoir prétendre à les bousculer.
A moins que le danger vienne de l'intérieur et du risque que comprend un système de jeu pensé autour d'un joueur de 34 ans. Mais que ce soit cette année ou la suivante, la question du remplacement de Pirlo finira forcément par se poser.