Gareca, l'oublié

Nous allons ici analyser le jeu de Velez et la qualité de son entraineur avec pour appui le dernier match ayant confronté le Newell's demi finaliste de la copa libertadores de Tata contre ce Velez, au blason redoré, del Tigre.

Première mi-temps

Dès l'entame du match nous voyons le 4321, formation en sapin se dessiner, même si nous pouvons également apprécier la montée d'un latéral, laissant une ligne de défense à 3 pour se mettre au niveau de la ligne de milieu et proposer une solution qui n'obligerait pas le jeu à revenir en arrière. Le latéral monte aussi agresser l'ailier porteur du ballon avec l'aide de ses milieux, empêchant alors de trouver une solution axiale et le forçant à reculer.

Si le 4321 est la formation de base, l'équipe se mue rapidement en 442 en losange (ou 4411) avec un milieu offensif pouvant autant servir à la création qu'apporter de la profondeur. Si l'action arrive à son terme, les 2 milieux relayeurs viennent (au niveau de l'actuel 10) apporter leurs soutiens, laissant le 6 en soutien et une attaque composée de 2 joueurs, appuyée par 3 autres.

A la 6min20, nous voyons une action des plus intéressantes où une attaque de deux joueurs en positions de pointe sont appuyés par 3 joueurs. L'appel d'un joueur placé alors en retrait, prenant la place de Pratto, qui donnera ensuite la passe dans l'intervale va alors être un indicateur de ce qui va arriver.

En effet, à la 8éme minute, nous voyons alors, le latéral gauche en débordement, attendre le ballon avant d'être enfin servit quand l'équipe a été mise en place pour ce coup de pied arrêté. Le milieu en losange est alors bien visible et le latéral en position de centre prend le rôle de deuxième attaquant, avec les 2 milieux offensifs en retrait, alors que le milieu relayeur à gauche, en soutien au départ de l'action arrive à toute allure; Poussant même son appel au-delà, en voyant la balle être arrivé dans les pieds de Pratto esseulé, -profité de l'aspiration des défenseurs par son attaquant- et laissant alors le champ libre pour déclancher une frappe et être à la retombée si il n'était pas hors-jeu (nous voyons aussi le latéral, prendre la place qu'il a laissé et reformé le "3 / 2 " qu'affectionne en phase finale cette équipe de Velez.

A croire que du côté des troupes de Gareca, on révise les gammes. le latéral participant au jeu, pousse alors son rôle jusqu'à son paroxysme, se trouvant en position de débordement, surprenant la défense de Newell's et la répitition du schéma de la précédente action, signe et digne d'un entrainement.

Comme nous le voyons à 9min20, en phase "défensive d'attente", l'équipe adopte un 442 à plat ou 4411 avec un joueur sortant sur le porteur du ballon quand celui-ci est dans sa zone. Ce qui permet à l'équipe de rapidement passer en phase de construction, d'attaque en passant en 442 losange, permettant la circulation de la balle et sa possession avec la formation naturelle de triangles notamment.

En revanche, à la 11min10 nous revoyons le 4321 se former et un pressing s'effectuer avant de voir 10 secondes plus tard une sortie autoritaire d'un défenseur quand un joueur adverse est trouvé entre la ligne de milieu et de défense.

18min15, alors que nous parlions des rôles des latéraux depuis le début du match, le dégagement fait voir que le latéral est complétement imbriqué dans la ligne de milieu, faisant apparaitre un 3421, assurant une présence à la retombée et sur les seconds ballons; Avant que la phase la plus incisive du pressing se fasse entrevoir durant ce match mais qui reste une constance de cette équipe, qui apparait alors en 4222, avec 2 pointes harcelant les défenseurs adverses et 2 soutiens. (passant même à l'extrême, au 3322 à la 20éme minute avec toujours un défenseur sortant des rangs)

Newell's prend alors le jeu à son compte. Alors qu'à 22min45 la montée ratée du défenseur avait déjà été un signe envoyé, celle de la 27éme s'avèrera malheureuse. La montée du défenseur centrale n'a pas été comblée par son latéral, laissant ainsi un trou plein axe derrière lui dans lequel le joueur de Newell's s'infiltrera. Le joueur sera forcé de faire faute et prendra son 2éme carton jaune, synonyme de rouge qui changera le match.

Nous voyons dès lors que Velez abandonnera quelque peu le pressing, défendant sur le reculoir et protègera son "entonnoir" . Néanmoins, alors qu'un milieu de terrain est sorti en faveur d'un latéral, pour combler le manque, nous voyons toujours sur le dégagement, le 3421 (passé en 3321 par la force des choses) se former qui pourra laisser à penser que les latéraux vont continuer à participer le plus possible au jeu offensif.

A la 33éme minute nous verrons également un signe de ce qui se passera durant quasiment le reste du match. L'équipe de Gareca est alors très compacte, a une défense assez basse, tous les joueurs sont dans leur moitié de terrain quasi systématiquement et sont "obligés" de délaisser les ailes.

Ainsi, à la 43min45, quand Newell's écarte, le 442 transformé en 441, devient alors un 531. Le fait d'écarter le jeu à forcer le milieu à suivre l'action et couvrir son latéral. De l'autre côté, dans le dos des défenseurs, un joueur plonge de nouveau, mais Bernardini ne parvient pas à le trouver grâce/à cause du retour de l'autre milieu de terrain. L'équipe de Velez est mal menée, trimballée de part et d'autres du terrain laissant seulement 2 milieux dans l'axe du terrain comme première ligne défensive.

Deuxième mi-temps

Si Velez a fini la première mi-temps, elle attaquera la seconde tambour battant. Si dans un 4321, les milieux offensifs peuvent tendre à s'exporter sur les ailes, mimant un 433, ici et à cause de l'expulsion, le latéral gauche, déjà décisif en première mi-temps, prendra à nouveau ce rôle d'ailier avant d'adresser un centre de nouveau sur Pratto, qui prend un peu le rôle d'un "Kaka de l'époque milanaise".

Nous verrons même, dès la 2éme minute après que les 2 lignes de 4 se soient formées pour la phase défensive, le losange prendre forme, bien que la pointe n'ait pas été totalement visible, le milieu ressemblant à un 4131 ce qui n'empêchera pas au Fortin de ressortir la balle très proprement (entre les deux relayeurs, Pratto étant sur l'aile droite) en recherchant une fois de plus l'appui avec l'attaquant de pointe. 

Mais très vite, la défense de Velez descendra, la ligne de défense se positionnera aux 18m, l'espace avec sa ligne de milieu se réduira de plus et un remake de la fin de la première mi-temps va alors se dessiner.

Si les joueurs de Gareca exécuteront à merveille leur remarquable marquage de zone et leur pression sur le porteur du ballon, ils courrent, beaucoup, trop même. Newell's, fait tourner, passant d'une aile à l'autre, en passant systématiquement par le rond central, où Heinze notamment, tente d'apporter de l'intensité, du dynamisme dans les actions des rojinegros. La descente progressive de l'attaquant dans ses 30 derniers mètres, tentant de venir aider un milieu en infériorité, ne fera qu'avantager la chose.

Ainsi, à la 17éme minute, les ailes inoccupées vont permettre au joueur de Tata d'ajuster un centre, qui sera reprit par une tête qui frôlera le montant. Newell's dicte son jeu et Velez plie de plus en plus, les jambes commencent à devenir lourdes passé l'heure de jeu et plus de 45minutes en infériorité numérique.

Après une tentative d'action plein axe à la 20éme, s'en suivra -alors que Pratto qui avait tant donné tant offensivement que défensivement venait de sortir- une nouvelle passe par-dessus la défense après les divers centres ayant déjà eu lieu. La défense a été travaillé comme depuis de nombreuses minutes, baladée de part et d'autre de sa moitié de terrain. Le latéral déporté sur l'aile pour mettre la pression sur son adversaire laisse alors place à un 3 vs 3 très visible à 24mn41 avec en plus, sur l'autre aile, un joueur pour "venir fermer". L'espace entre les lignes est conséquent (dû aux efforts répétés et au pressing forçant la ligne de milieu à sortir sur le porteur du ballon) et les protégés de Tata peuvent aisément s'y engouffrer. Le jeu du HJ obsessionnel fera oublier aux défenseurs le marquage individuel (on est alors dans un 5 vs 5 (à 24mn47), ainsi, 2 défenseurs au coude à coude laisseront dans leurs dos, un joueur esseulé qui s'avèrera ensuite possiblement en position litigieuse grâce à un allignement parfait.

Les milieux de Velez , moins arcquebouttés sur leurs 22m forcent les milieux adverses à jouer plus long et précipité un temps soit peu leur attaque étant pour l'une des rares fois en infériorité numérique ( 3 vs 2 à la 30mn30)

Malheureusement, le replacement et les milieux bloquant désormais les ailes -comme le demande Gareca au bord de la touche depuis plusieurs minutes et a apporté cet ajustement en plus de fraicheur physique avec la sortie de Pratto- c'est l'axe qui est désormais en infériorité numérique, un 4 vs 2 se forme avec le décrochement d'un attaquant se plaçant idéalement (encore une fois) entre les 2 lignes défensives. (30mn45) avant que le milieu gauche amorcera le mouvement qui fera que les milieux de Velez ne viennent se refermer sur le porteur du ballon et cette zone du terrain. (dans le même temps ou une 2 secondes après) forçant ainsi, le milieu à trouver une solution et perdre la balle.

Comme trop souvent, la relance de Velez est approximative, encore plus durant ce match et sa physionomie si particulière. Dans un chaos où la ligne de milieu n'a pu se replacer et l'agression du porteur du ballon a été précipité (31min), un joueur est enfin trouvé en plein coeur de la défense, qui n'a pas le temps malgré la montée du défenseur d'être bloqué effectuant une seule touche de balle, voir une simple déviation. Le milieu gauche, acculé est bloquant son aile, couvre le receveur de cette talonnade (31mn02)

Les milieux viennent de plus en plus compléter la ligne de défense, alternant côté droit ou gauche, laissant 3 joueurs au milieu. Les milieux extérieurs (sur les ailes) frais grâce aux changements de leur entraineur, peuvent amorcer un pressing également et faire reculer l'attaque adverse en retrouvant les 2 lignes défensives de quatre du début de match. (31mn35) Quand les milieux prennent leurs places sur les ailes, l'attaquant redescend même afin d'aider un milieu axial de plus en plus sur les rotules après près d'une heure jouée en infériorité numérique.

Après avoir pourtant réussit à faire passer une transversale vers l'ailier (33min30), avant que Dominguez ne couvre l'incursion, 2min45 plus tard, la transversale d'Heinze ne pourra être contrôle, le pressing est efficace, les ailes enfin couvertes parfaitement. L'essui-glace ne fonctionne plus et la frappe de loin d'Heinze sonnera comme un aveu d'impuissance.

Après un dernier danger survenu la minute d'après avec 2 centres succédés, Velez finira son match plus tranquillement, un équilibre enfin rétabli après plusieurs frailleurs résultant d'un déficit numérique et physique s'étant fait ressentir de plus en plus à partir de l'heure de jeu.

Malgré avoir souffert, et le regret personnel d'avoir eu à faire à une défense trop souvent, des plus attentistes, Gareca aura finit par remporter son duel. Après avoir déroulé " comme à l'entrainement " en début de rencontre sur plusieurs occasions, l'entraineur argentin a su répondre aux exigences du match. Répondant à une situation d'urgence qui ne lui était nullement familière; A savoir être dominé et en infériorité numérique pendant plus d'une heure de jeu.

En extrapolant un tantinet ... Si nous avons vu du Bielsa dans les sorties des défenseurs centraux, du Heynckes dans le replis défensif, du Ancelotti dans l'établissement de son schéma, de son animation ou du Mourinho version Barça / Inter dans la résistance, nous ne pouvons nous empêcher de rester sur notre faim ...

Bien que cette équipe qui a pliée et non rompue, le point faible de cette équipe et bel et bien la défense. Si les duels, les montées sur le porteur laisse notamment à désirer, on ne peut s'empêcher de regretter la relance, cherchant trop souvent le seul jeu long, ne sachant pas gérer le pressing adverse, trop rarement percer une ligne, chose qui assurerait pourtant d'autant plus de maitrise, d'incisions et une construction mieux préparée. Par faute d'y avoir penser ? Peut-être... Par manque de moyens ? Sûrement. Nous serions tous curieux et probablement enchantés de voir ce que pourrait faire cet entraineur en Europe avec des joueurs plus complets, lui permettant de pouvoir élaborer encore plus sa philosophie de jeu.

Malheureusement pour les amoureux du football européen et heureusement pour les autres, l'intéressé a déjà déclaré vouloir être " le Ferguson de Velez".

Analyse + texte d' Enzo64 et screens de Juanma Lillo