Bielsa, un mistral nouveau

Dans le conflit entre Labrune et Bielsa dont les secousses se font encore sentir sur la canebière, le peuple marseillais avait rapidement choisi son camp : celui des sentiments, de la passion, de la folie, de l'excès. Mais celui aussi du professionnalisme, du jeu et des résultats. Sans rien changer à ses habitudes, Bielsa a fédéré toute une armée de partisans autour de lui, tandis qu'il mène ses troupes vers les grandeurs.

Non, il ne s'agira pas de dire que cette année, Marseille peut viser le titre. Même du coté du vieux port, on évite d'y songer. La puissance de la capitale semble encore bien trop forte, trop hégémonique, trop supérieure pour se mettre à rêver du titre de roi de France. Battre Paris sur un match, pourquoi pas, l'inquiéter, avec plaisir, le talonner, on en sourit, mais le renverser de son trône semble présomptueux. Mais peu importe. A Marseille, on regarde de nouveau de l'avant, on salive de la confrontation future face aux troupes de Blanc, dont on se moque joyeusement en le comparant à Bielsa, on envisage le retour de la reine des compétitions, et surtout on marche droit devant, droit au but. Car El Loco a ramené une chose essentielle pour avancer, plus encore que le plaisir qui se dégage de la vision des matchs de Marseille cette saison : l'espoir. Marseille rugit son bonheur, célèbre ses victoires, porte en triomphe Bielsa, mais surtout Marseille espère.

Si du coté de la capitale, les ennuis longs des prestations de l'automne saignent l'ardeur d'une langueur monotone, Marseille se baigne et se fête dans l'été indien. Cinq succès consécutif et de plus en plus marqué et construit assure à l'OM d'être au soir de la septième journée leader. Une situation probablement passagère, mais l'essentiel est ailleurs : dans une ligue 1 où les prétendants aux parisiens semblent de plus en plus faible et battre de l'aile, le club olympien a à nouveau un rôle à jouer. Celui d'emmerdeur pour Paris, et celui de locomotive pour les autres. Un rôle qu'il n'aurait jamais du perdre, mais où il s'est égaré dans des discours d'entraîneurs qui parlaient plus de poser les couilles sur la table que le pied sur le ballon. A Marseille, on parle désormais de jeu, on construit des attaques en triangle au lieu de tourner en rond, on soigne la fameuse première relance que possède tous les grands clubs, on joue.

Bien sûr, certains diront que les marseillais s'emballent, que ce n'est que sept matchs, que Paris finira bien par revenir, et puis ce n'était que ce n'était que Rennes, Reims ou autre Evian. On leur rappellera tout d'abord que le championnat de France est composé majoritairement peu ou prou de ce genre d'équipe, et surtout qu'il est bien rare de voir une équipe montrer un tel écart régulier avec elle. Également que nous, même pas marseillais, on a envie d'y croire. Parce que Bielsa apporte un vent nouveau sur la ligue 1, une vision étrangère qui nous est tristement inconnue. Celle du jeu, tout simplement, de l'offensive, de la prise de risque et du résultat qui l'accompagne. Et si la Ligue 1 mutait enfin ? Les vieux dinosaures qui parlent de conserver le point du match nul conféré à la première minute, d'avant tout bien défendre, de ne pas prendre d'initiatives, résisteront-ils longtemps à la puissance de ce nouveau Mistral ? En vérité, c'est cela qu'on espère tant de Bielsa, on sait qu'il fera évoluer l'OM, mais s'il pouvait dans le même temps aider à la révolution du foot français, on l'aimerait d'autant plus. Alors là, les mêmes discours sceptiques riront de nos propos. El Loco ne durera pas, comme il n'a jamais duré, les crises internes imploseront, un entraîneur bien franchouillard prendra sa place en parlant juste de se battre et de mouiller le maillot, en oubliant que ces valeurs étaient aussi primordiales chez l'argentin, mais qu'il y en avait tellement d'autres, et que les dinosaures que l'on hait tant sans bien trop fossiliser dans la roche pour craindre cette soufflante passagère. Mais ils feront fausse route. L'important dans le football ce n'est pas d'avoir raison à la fin, c'est d'avoir rêver, de s'être enflammé, d'y avoir cru, d'avoir connu l'euphorie, l'allégresse, l'espoir. Valeurs que transporte désormais le Mistral dans les artères de Marseille, dans un souffle fou, un souffle de Bielsa.

Ligue 1 France OM entraineur Actualités Analyse Marseille

2 votes. Moyenne 5.00 sur 5.

Ajouter un commentaire