Un soir sans ligue des champions

Quand la magie n'est plus

Quand la magie n'est plus, quand l'amour est passé, héros déchus, amants blessés...
Pendant que tous parlent des matchs de ce soir ou de demain, retour sur ces supporters qui affronteront nul Bayern ou Barcelone, mais bien le néant footballistique d'un soir sans Ligue des champions. Ces anciens clubs phares qui vivent aujourd'hui loin des lumières et des strats de la belle, qui, quoique superficielle et impitoyable, fait toujours autant vibrer les coeurs des footeux, même ceux qu'elle a brisé.

Au fond, on l'a su dès le premier regard qu'elle nous a lancé, un soir de notre douce enfance. Elle ne l'a jamais nié, elle serait une maitresse bien capricieuse et ô combien hautaine. Nous ne nous le sommes jamais caché, quelque soit ses défauts, c'était elle, et pas une autre. La ligue des champions, dès le premier match que l'on a regardé, dès les premières notes de son hymne porteur de tant de frissons et de tensions, dès le premier choc entre deux géants européens, nous avait envouté. Plus épique que le championnat, plus prestigieuse que les coupes nationales devenus bien dérisoires, il y avait elle, ô combien convoitée, mais qui un jour serait notre, on se l'était promis.

On l'a parfois détesté, lors de ce but adverse dans les dernières minutes, au son de la barre transversale d'un pénalty raté par notre vedette, à cet arbitre qui n'avait pas vu ce hors jeu qui aurait tout changé. Elle rendait alors nos bières bien amères, les réflexions de nos amis insupportables, nos cœurs trop lourds. Car la ligue des champions se dérobe plus qu'elle ne s'offre. Pourtant, on l'aime toujours autant passionnément, pour tout le reste. Ce but mémorable, cet arrêt phare, cette victoire légendaire, ce parcours magnifique. Parfois même, avons nous eu la chance de voir de nos yeux émus notre club la remporter, lors d'une saison gravé désormais à jamais dans l'histoire du club, lors d'une soirée inscrite pour toujours dans notre mémoire. On se rappelle alors pourquoi on craque tant pour elle et au nom de quoi on lui pardonne sa cruauté. Oui, on était toujours les premiers au pub ou sur le canapé, prêt à voir notre équipe se mesurait à toute l'Europe, même lorsqu'on savait pertinemment que ce n'était pas nous qu'elle choisirait pour sa valse finale. Il est de ces voyages si beau qu'ils valent le coup de les entreprendre même si l'on en atteint pas la destination.

Mais un jour, elle nous a plaqué. Peu importe les années de fidélités, les moments mémorables partagés, et même d'avoir été jadis le vainqueur de cette course folle et annuelle pour son cœur. Nous n'étions plus assez bien. La ligue des champions vit pour le moment présent, et ne s'embarrasse pas de nostalgie. Avons-nous la moindre pensée pour Nottingham Forest ou Hambourg, ces amants de jadis devenus aujourd'hui bien étranger à sa cour ? C'est bien là notre peur la plus enfouie, notre crainte la plus profonde : devenir comme eux. Va pour être humilié, c'est le jeu après tout, ok pour être rejeté de temps à autrs, si tel doit être notre chemin de croix, mais être oublié, jamais! Comme tout être ayant subi une rupture, on se persuade qu'elle reviendra, en se demandant simplement quand. On se rassure avec l'arrivée d'un Di Maria, la faiblesse des équipes de Ligue 1 nous permettant peut-être une place sur le podium, la nomination d'Inzaghi comme entraîneur, ou toute autre hypothèse à laquelle on s'accroche comme des certitudes pour ne pas avoir à affronter ce qu'il se passerait si elles s'avéraient fausses.

Que l'on soit lyonnais, rossonero , mancunien, marseillais, intériste, pendant longtemps cette ligue des champions fut un rendez-vous aussi attendu qu'annuel. Mais cette année, voir depuis plusieurs saisons, l'agenda indique des soirs de mardi et mercredi tristement vide. On affronte les railleries des autres, l'absence de ce frisson et de cette attente insoutenable les après midis d'avant-match, les pronostics sur les chances de notre équipe de rafler la plus belle. Non, cette année, c'est certain, elle ne sera pas des nôtres. Ou plutôt, nous ne serons pas des siens. Certains regarderont quand même ces phases de poules, avec moins d'excitation et de passion, mais toujours cette même magie de voir l'Europe du football s'embraser. Ils souriront de revoir Liverpool ou la Roma, eux aussi jadis bannis des années durant de cette élite, et qui auront su retrouver ses grâces. Un jour, ce sera nous. Et puis il y a ceux qui bouderont la belle, cracheront sur ses prétendants qui ont volé leurs places. C'est vrai après tout, ''Lille c'est bien gentil, mais si c'était pour fournir si peu d'imagination face à Porto, autant nous laisser votre ticket'' et autre ''Naples ? Non mais vraiment, vivement qu'on revienne apprendre comment on fait pour faire briller sur l'Europe. Sept C1, et nos coupes continentales on les obtient sans le moindre rail de cocaïne s'il vous plait.''. Que voulez vous, l'amour déchu rend toujours un peu aigri. Même les plus boudeurs céderont surement devant une affiche de rêve en quart, demi ou finale. Avant même d'aimer notre club, on aime le football, et la belle sait nous séduire.

La saison semble déjà plus morne sans ces rendez-vous de milieu de semaine, sans cette nouvelle confrontation face à ce que le vieux continent fait de mieux, certains commencent presque à s'y habituer, hideuse sensation, d'autres découvrent cela pour la première fois, apprenant à faire avec, ou plutôt sans. La préoccupation est de toute façon toute trouvée : une année sans la coupe aux grandes oreilles a un objectif principal et concis, la retrouver. On commence déjà les calculs d'apothicaire, les revues d'effectifs des concurrents à ces fichus places qualificatives qui se sont dérobess à nous. Oui, un jour on goutera à nouveau à cette joie, nos mardis et mercredis seront réservés, nos poils dressés, nos rêves alimentés. En attendant, aujourd'hui est un mardi sans ligue des champions pour nous comme pour beaucoup d'autres. De son coté, elle n'en a cure, et s'amusera à voir les Munich, Madrid, Barcelone et autres Chelsea se disputer ses charmes. Et nous, ex béats, d'un regard faussement indifférent puis de plus en plus attiré par elle, nous regarderons cette triste et à la fois belle réalité : Avec ou sans nous, la ligue des champions valse les mardis et mercredis soirs, et elle danse divinement bien la bougre.

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